DU CONCEPT DE STRUCTURE
La notion de structure, est empruntée à Bergeret
(1985) qui considère cette dernière comme une "organisation primaire de
base," régie par des règles d'assemblage, de liaison et de
transformation. Il s'agit donc d'un ensemble organisé de rapports,
interagissants en créant une dynamique propre et une manière d'entrer en
contact avec le réel.
Lorsque l'on considère la structure d'un individu donné, l'épithète
psychotique perd son aspect pathologique voir même menaçant qu'il lui a été
trop longtemps associé. Quand un individu se comporte selon son organisation
structurelle psychotique, en relation avec le monde extérieur et son monde intérieur,
il est en mesure de connaître une vie tout à fait adaptée et satisfaisante.
Cependant, si les exigences de son environnement devenaient par trop intenses,
trop fortes, alors sa structure tendrait vers l'instabilité, causant des
comportements inadaptés et parfois dangereux pour l'individu ou son entourage.
Il en va de même de la structure névrotique décompensée, elle entraîne
l'individu dans des comportements inhabituels et destructeurs.
Bergeret (1985) fait état de deux structures psychiques stables: la structure
psychotique et la structure névrotique. Ces deux structures se subdivisent en
infrastructures; chez les psychotiques: schizophrénique, paranoïaque et mélancolique
et chez les névrotiques: obsessive, et hystériques ( d'angoisse et de
conversion ). À ces deux structures, Bergeret fait état d'un troisième type
d'organisation qui se situe entre la structure psychotique et la structure
névrotique et qu"il nomme " états limites". On ne peut parler
d'une structure puisqu'il s'agit d'un type de dynamique qui ne possède pas de
structure (astructuration).
Il est important de bien comprendre qu'une structure
est une façon d'aménager la réalité, c'est à dire notre rapport avec
l'extérieur et avec le désir. Le désir est avant tout ce que l'on ne possède
pas c'est à dire la satisfaction immédiate et totale. Le désir naîtrait donc
d'une blessure narcissique conséquente de la prise de conscience de la
différence entre l'intérieur et l'extérieur. L'extérieur étant perçu comme
source d'insatisfaction et de frustration. L'accès à l'extérieur et au désir
de l'Autre implique en premier lieu la capacité d'élaborer un imaginaire
sécurisant. Je dirai que cette capacité passe par le lien d'attachement que la
mère développe avec son enfant lors des trois premiers mois et aussi
paradoxale que cela puisse paraître, cet attachement doit aller dans le sens du
détachement. La mère doit apprendre à l'enfant à se forger petit à petit
une image intérieure de sa mère et ainsi pouvoir se passer d'elle un jour...
tout un contrat pour les mères, d'autant plus que le rapport entre la mère et
l'enfant lors de ces trois premiers mois se passe d'inconscient à inconscient.
C'est avec les désirs les plus profonds de la mère que l'enfant forgera son
imaginaire! Françoise Dolto en a abondamment parlé. Et le conseille qu'elle
donne aux mères est: ne mentez pas à vos enfants quelque soit leur âge.
Encore faut-il ne pas se mentir à soi-même... autre contrat. L'enfant qui aura
accès à un imaginaire sécurisant et souple pourra se permettre d'élaborer
des scénarios de plus en plus riches et complexes sans se sentir menacé de
désintégration. Cette angoisse de désintégration est probablement l'une des
plus primitive; elle naît de la peur de se voir disparaître lorsqu'un dans les
premiers mois de la vie la satisfaction d'abord orale se fait attendre. C'est la
période schizo-paraonïde de Mélanie Klein. Période marquée par le
clivage (séparation radicale) entre le bon et le mauvais sein; d'une part celui
garant de la satisfaction orale et l'autre, représentant de cette angoisse de
désintégration.
Lors de la position "schizo-paranoide", le
nourrisson ressent comme très menaçant pour son intégrité toute frustration.
Devant la menace d'annihilation, le système coupe les ponts avec l'extérieur
en s'efforçant de détruire toute représentation frustrante. Par contre, comme
le souligne Rosenfeld (1987), ces sentiments de destructions deviennent une
menace si grande que l'individu ne peut les conserver et y faire face. Face à
l'incapacité de réunir à la fois le "bon et le mauvais seins",
l'enfant fait un clivage, lui permettant de conserver le premier et de rejeter
le second. Même si l'enfant parvient à cliver les deux représentations, il en
aura introjeté ( incorporé) les affects. C'est sous forme de plaisir et de
satisfaction que sera incorporé le bon objet dans le Moi pour constituer l'Idéal
du Moi (Segal 1979) et sous la forme de rage et de colère, par projection que
le nourrisson tentera de se débarrasser de la représentation frustrante.
Cependant, l'introjection, visant avant tout la pulsion, conservera ses représentations
qui seront récupérées par le Surmoi. Ce clivage, entre "bon et mauvais
objet" amène Klein (1940) à développer la notion de Surmoi archaïque,
représentant de la pulsion destructrice et par le fait même réservoir des
affects de rage, de peur et de colère.
C'est par le concept de narcissisme primaire que Freud (1914) définit
l'investissement libidinal de cet Idéal du Moi en opposition avec
l'investissement des l'objets extérieurs. Ce narcissisme primaire entraîne
d'une part un sentiment d'omnipotence et un investissement auto-érotique
assurant une certaine maîtrise de l'objet et le retrait du "monde extérieur".
Le renversement de la prévalence des pulsions (pulsion de vie versus pulsion de
mort) dépend de la façon dont sera incorporé le bon objet, et du niveau
de satisfaction qu"il engendre. Cet Idéal du Moi s'associe au Surmoi,
permettant à l'enfant d'intégrer une image globale de l'Autre où la menace de
la destruction est devancée par la gratification et la satisfaction. Cette
image globale de l'Autre nécessite le pouvoir de se représenter l'Autre
comme à la fois source de plaisir et de déplaisir. nécessite également la
capacité de réparer l'objet lorsque celui-ci est partiellement détruit.
Cette image de l'Autre ne peut s'effectuer sans une reconstruction dans
l'imaginaire; une reconstruction douloureuse qui demande de mettre de coté la
toute puissance et la fusion pour aller vers le désir et la différence. Tout
un contrat pour l'enfant... Pour Klein, cette reconstruction passe par une phase
dépressive (débute vers l'âge de trois mois jusqu'à six mois) lors de
laquelle l'enfant apprend à composer avec le manque, à se différencier à se
faire une représentation de l'Autre. Diatkine et Simon vont encore plus loin,
en formulant l'hypothèse que le complexe d'Oedipe prend ses racines à ce
moment, à ce moment où l'enfant ressent que les absences de cet Autre implique
qu'il y a un troisième avec lequel "maman" est occupé. Nouvel
élaboration de l'imaginaire. Puis-je exister dans l'absence et quelle
satisfaction puis-je en retirer? Répondre à cette question c'est passer de
l'Imaginaire au Symbolique. Répondre à cette question c'est aussi faire face
à la dépendance et la toxicomanie. C'est passer du stade oral au stade anal
(18 mois 3ans) l. C'est du désir de se différencier, du désir d'être reconnu
sans être désintégré par l'Autre. Nouveau saut dans l'imaginaire: comment
susciter l'attention et la reconnaissance de la part de l'Autre, comment prouver
mon existence. «je dois m'affirmer comme être au monde et dans le monde. Phase
exploratoire comme pas une, apprendre à contrôler l'intérieur de son corps
(contrôle des sphincters) , apprendre à contrôler l'extérieur (la marche)
apprendre à contrôler son expression (langage) et ceci sous le regard attentif
des parents. Ces trois apprentissages fondamentaux comme le souligne Freud vont
poser les bases de l'estime de soi et préparer l'enfant à un nouveau plongeon
dans l'imaginaire qui celui de la représentation du désir. Ce nouveau plongeon
parfois acrobatique nous entraîne dans les eaux tumultueuses du stade
phallique et du complexe d'Oedipe. Ici s'élabore véritablement le rapport avec
le désir. Susciter le désir, le provoquer, c'est encore une façon
d'exister, d'être reconnu; encore faut-il avoir l'espace et la liberté suffisante
pour son élaboration.
Je veux susciter la même attention les mêmes égards que maman à avec papa
ou l'inverse. Je veux avoir accès à ce quelque chose d'unique que papa et
maman partagent. Non seulement je veux y avoir accès mais je ne veux pas le
partager. Autre apprentissage fondamental: je n'aurai jamais droit de
partager ce que papa et maman vivent quand ils ferment la porte de la chambre.
Et ceci doit être sans équivoque! De la façon dont ce deuil sera amorcé
dépendra notre façon de nous investir dans notre rapport amoureux.
Pour Lacan, c'est ici qu'intervient la Loi du Père, le Non et le Nom du Père.
D'une part faire comprendre à son fils qu'il n'aura jamais accès à la mère
et d'autre part reconnaître à sa fille sa part de séduction tout en lui
faisant comprendre qu'elle n'aura jamais accès à lui. Cette Loi est en quelque
sorte garante de l'identité sexuelle et sociale. Pour l'enfant, cet interdit
est synonyme de deuil. Chaque individu vit ce deuil à sa manière à partir de
son imaginaire (c'est à dire à partir de l'élaboration fantasmatique qu'il se
fera du rapport qui existe entre ses parents et l'accès qu'il peut-y
avoir. ; cependant à une extrémité, certaines personnes ne le vivront
jamais et je pense ici à de nombreuses victimes d'inceste. Le garant du désir
c'est l'interdit de l'inceste c'est ce que nous ne devrions jamais posséder. Y
avoir accès c'est la meilleure manière d'interdire l'accès à tout autre
rapport amoureux. à l'autre extrémité il y a ceux et celles qui ne se sont
pas sentis reconnus dans leur pouvoir de susciter le désir, dans leur pouvoir
de séduction et qui vont passer une grande partie de leur existence à tenter
de démontrer qu'ils en ont un. Entre les deux tous ces individus qui tentent de
donner un sens, qui tentent d'élaborer une relation où la différence n'est
pas trop blessante, voir satisfaisante et gratifiante. Autre gros contrat...
I. Structure psychotique: La
première étape du développement de la personnalité passe par la capacité
d'établir des distinctions entre l'intérieur et l'extérieur. Les premiers
mois de la vie (0-3 mois) sont selon Mélanie Klein sous le signe de la toute
puissance narcissique, du clivage et de l'indifférenciation entre l'intérieur
et l'extérieur. Il n'y a donc pas de différence entre ma mère et moi.
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